II Dimanche de Carême
Donne-nous, Seigneur, le courage de l’hanneton
Puis il le fit sortir et lui dit : « Regarde le ciel, et compte les étoiles, si tu le peux… » Et il déclara : « Vois quelle descendance tu auras ! » Abram eut foi dans le Seigneur et le Seigneur estima qu’il était juste. Puis il dit : « Je suis le Seigneur, qui t’ai fait sortir d’Our en Chaldée pour te mettre en possession de ce pays. » Abram répondit : « Seigneur mon Dieu, comment vais-je savoir que j’en ai la possession ? » Le Seigneur lui dit : « Prends-moi une génisse de trois ans, une chèvre de trois ans, un bélier de trois ans, une tourterelle et une jeune colombe. » Abram prit tous ces animaux, les partagea en deux, et plaça chaque moitié en face de l’autre ; mais il ne partagea pas les oiseaux. Comme les rapaces descendaient sur les morceaux, Abram les écarta. Au coucher du soleil, un sommeil mystérieux s’empara d’Abram, une sombre et profonde frayeur le saisit. Après le coucher du soleil, il y eut des ténèbres épaisses. Alors un brasier fumant et une torche enflammée passèrent entre les quartiers d’animaux. Gn 15,5-12.17-18
Dix ans avant l’événement qui est raconté dans le passage d’aujourd’hui Abram faisait partie d’une famille de nomades et vivait dans la terre d’Our, entre le Tigre et l’Euphrate. Cependant, le Seigneur avait posé son regard sur lui et l’avait appelé à être la souche de cette grandiose œuvre divine qui est toujours en cours : l’histoire du salut du monde. Il lui avait dit : « Pars de ton pays, laisse ta famille et la maison de ton père, va dans le pays que je te montrerai. Je ferai de toi une grande nation, je te bénirai…. Voilà le pays que je donnerai à ta descendance. » (Gn 12,1-7) Abram avait eu foi dans le Seigneur et il était parti avec sa femme, Sara, déjà avancée en âge, et pendant dix ans il avait vécu en nomade, plantant sa tente un jour ci et un jour là. Il n’avait pas d’enfants ni caressait l’espoir d’en avoir car, entretemps, Sara avait vieilli. Son projet humain était d’abandonner ce monde sans laisser de traces ni de descendants, car il n’avait ni enfants, ni terre, ni avenir. Voilà pourquoi Abram s’était plaint au Seigneur : « Tu ne m’as pas donné de descendance, et c’est un de mes serviteurs qui sera mon héritier. » (Gn 15,3) C’est à ce moment-là que commence le passage d’aujourd’hui : « Puis il [le Seigneur] le fit sortir et lui dit : ‘Regarde le ciel, et compte les étoiles, si tu le peux…’ Et il déclara : ‘Vois quelle descendance tu auras !’ » Ensuite le Seigneur conclut avec Abram une alliance selon un rituel en vigueur à ce moment-là dans la terre de Mésopotamie et il lui promet aussi une terre : « Je donne ce pays à ta descendance. »
Dans toute cette histoire, le grand mérite d’Abram est d’avoir encore eut foi dans le Seigneur et d’avoir accepté qu’il le fasse sortir de sa tente pour lui montrer le ciel étoilé et lui répéter la promesse qu’il lui avait fait il y a dix ans. Mais Abram n’est pas seulement sorti de sa tente : il est sorti de ses projets de vie ; de ses limites, de ses doutes, d’une vie sans espérance et de tout ce qu’il avait imaginé, pensé et espéré jusqu’à ce moment-là. Voilà quel a été le courage d’Abram et c’est le même courage que le Seigneur demande à chacun de nous. Nous avons tous nos limites, nos incertitudes et nos déceptions mais nous avons aussi à réaliser le projet que le Seigneur a établi pour nous. Sortons donc, nous aussi, de nos pauvretés et de nos situations embrouillées et acceptons de relever le défi de sortir dehors pour regarder le ciel et compter les étoiles : notre projet aussi est grand comme le firmament ! Ne risquons pas de le rendre tout petit ! Ayons le courage du hanneton, un insecte qui, sur la base des calculs faits par les scientifiques, ne pourrait guère voler compte tenu de son corps, de ses ailes et de sa forme : pourtant, malgré ses limites, le hanneton vole quand même.